Un cabaret du 8 mars ensorcelé

Un cabaret du 8 mars ensorcelé

Le 8 mars au soir, au bar-coop l’AgitéE, se tenait le Cabaret du 8 mars, événement tant attendu, car il s’agissait d’un événement non-mixte.

C’était ma première expérience du genre. Comme tout ce qui est appelé dans ce genre d’endroit, à 19h, heure annoncée, l’ambiance était rose mais peu de femmes étaient présentes, sauf les organisatrices et quelques participantes. Plusieurs filles étaient nerveuses, certaines soliloquaient dans les coins; pour la plupart d’entre elles, je l’apprendrais plus tard, c’était la première occasion de monter sur scène. Petit retour sur quelque chose de spécial.

On s’embrasse, on rigole, on boit de la bière ou autre chose. À travers l’apparente désorganisation et la pénombre bar, en fait, tout se met en place de façon diffuse, sans crier gare. Des apartés ont cours. Rien de tonitruant. On distingue les ombres qui se font signe, qui vont voir, qui indiquent.

Pendant ce temps, la foule envahit le plancher. De trente, on monte à soixante, puis à plus de cent en cours de soirée. Sur le bar, des fruits, des légumes, des croustilles. Et des friandises  invitantes : des vulves en chocolat. Et le Cabaret commence.

Le numéro de danse Gumboot ouvre le spectacle en apportant quelque chose de très libre et sauvage. L’auditoire claque des mains au rythme vif et se laisse emporter par le rire. C’est à ce moment surtout que les femmes qui, comme moi, en sont à leur premier spectacle non-mixte, pouvent réaliser la grande liberté de gestes, d’attitudes, qui imprègne ce genre d’événement. De la part des femmes sur scène, et des spectatrices, toutes unies dans un regard semblable, dans un fou rire, affranchies, certaines pour quelques heures, d’un carcan invisible.

On entend des chanteuses , des poètes dont  Geneviève Lévesque qui, dans ses poèmes, nous dit les femmes, avec feu, avec tendresse et colère, avec révolte. Un petit théâtre de marionnettes est installé et crée un espace de jeu enfantin, durant plusieurs minutes. Sarah Toussaint-Léveillé et sa claviériste précèdent un numéro des Monologues du Vagin tenu par les filles qui feront le spectacle complet les 13 et 14 mars prochains.

Tous les numéros du Cabaret sont enchainés par des sketchs humoristiques. Il faut bien se payer la traite. Dire qu’il y en a pour prétendre que les féministes n’ont pas le sens de l’humour… C’est bien loin d’une atmosphère coincée.  Suit un numéro de cirque, tout en grâce et en lumière. Une chanteuse de Baie-Saint-Paul nous fait un numéro de variété oscillant entre l’humour, l’intimité et la colère: la chanson dédiée à l’être perdu, refusé, avorté vient rassembler la communauté dans une compréhension plus facile à partager entre elles.

Puis TintAnar la fanfare (cette fois-ci féminine)  qui, accompagnée d’une chorale, et de slammeuses et de musiciennes de Montréal, joue entre autres Sans la nommer, vient éclater sur scène. Beaucoup de filles et de femmes de la salle maintenant bondée entonnent ce chant. L’appel est lancé, on se lève pour danser, chanter, chahuter.

On descend les tables et les chaises au sous-sol, après la sortie de notre fanfare préférée, afin de transformer la salle de Cabaret en piste de danse. Les chansons choisies par les participantes à la soirée sont toutes de filles… sauf une. On danse, saute, tourne. On boit aussi. Les notes de Miss Maggie de Renaud feront un drôle de courant d’air après des heures de voix féminines. Comme dit une amie, aussi bien en profiter pour aller en griller une.

Au final, cette soirée fut enlevante et émouvante et je comprends pourquoi son organisation entraine tant de femmes chaque fois. Ça vous dit de vous amuser entre filles, entre femmes? Ça veut tout dire. C’est vraiment se libérer soi-même d’un poids énorme. Merci beaucoup aux organisatrices de cet événement rare et apprécié. Femmes, filles, si vous n’avez pas encore essayé la non-mixité, ne ratez pas ça l’an prochain.

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